jeudi 22 novembre 2018

LA CONFRÉRIE DE LA DAGUE NOIRE 15 : L'AMANT REBELLE de J.R. Ward


4ème de couverture :
"Le traître Xcor a été condamné à mort. Pourtant, au terme d’une vie de crime et de malfaisance, seul un regret demeure : la perte de celle qui n’a jamais été sienne, l’Élue Layla. Celle-ci sait que la seule façon de sauver la vie de Xcor est de faire éclater la vérité sur ses origines. Mais cela signifie également s’exposer à perdre tout ce qui lui tient à cœur, y compris son rôle de mère… Déchirée entre l’amour et la loyauté, Layla doit trouver le courage d’affronter sa seule famille pour l’homme qu’elle aime. Et même si elle parvient à arracher le pardon de Xcor, un défi plus grand encore les attend : créer une alliance entre deux mondes que tout sépare…"

Alors, doc, verdict ?
J'attendais beaucoup de cette histoire, dont le potentiel érotique et guerrier promettait des scènes épiques.
En effet, dès la première apparition de Xcor, ce personnage a attisé ma curiosité. Avec un peu de honte, j'avoue avoir été séduite grâce à sa façon de traiter une prostituée, lors d'une scène carrément hot. Et si j'ai été déçue par le choix de lui coller une Élue dans les pattes, j'ai fini par apprécier la construction de leur relation et la révérence dont ce mâle a toujours fait preuve, malgré ses actes sanguinaires au combat.
Concernant leur relation charnelle, je suis déçue car j'espérais un peu d'innovation. Les scènes érotiques sont très classiques, ça manque clairement de sensualité. On était en droit d'attendre mieux d'un couple qui se chauffe depuis 4 ou 5 tomes !

Écrite comme le Romeo et Juliette de la saga, leur romance trouve d'ailleurs sa concrétisation finale un peu trop facilement à mon goût.
C'est contradictoire avec les premiers chapitres qui ouvrent les hostilités avec beaucoup de violence. Vhif découvre leur histoire d'amour et pète complètement les plombs, faisant ressortir le pire chez un personnage déjà peu sympathique.
Son comportement a définitivement enterré toute empathie à son égard. Son degré de misogynie atteint des sommets (misogynie déjà très présente à la base, dans cette série). Je me suis même mise à plaindre Blay, son compagnon, seul personnage un minimum intelligent et réfléchi. Je me demande encore ce qu'il fait avec ce connard manipulateur.

Point particulier de la traduction française qui a adapté certains prénoms. Merci bien, c'est vraiment la merde !
En l'occurrence Qhuinn a été transformé en Vhif, ce qui est fort peu pratique quand on remet sur le devant de la scène un guerrier prénommé Viszs (enfin Vishous, surnommé V ou Viszs, donc). J'ai déjà du mal avec les H plein les noms, mais là, ça a rendu les combats encore plus confus.

Bref, pour en revenir à la façon ignoble dont Vhif traite Layla (au point d'en rejeter sa propre fille pour une question de ressemblance), cela a créé un vrai malaise. Parce que cette haine disproportionnée, cette rancœur, ce besoin viscéral d'infliger de la souffrance et de stigmatiser une femme, m'a fait penser à la façon dont certains "résistants" tondaient les "traitresses" ayant fraternisé avec l'ennemi, pour les "punir d'avoir aimé les mauvais gars".
Ce n'est que de la fiction, mon parallèle peut paraître déplacé, mais je trouve hyper malsain de dédouaner un personnage à cause de sa relation amoureuse. J'en ai plein le dos de croiser des lectrices soupirant qu'ils "sont troooop mignons avec Blay". Non, Blay est un homme valeureux, mais son compagnon reste un sombre con, et le fait d'être homo ne lui donne pas l'absolution. Ça me rappelle cet article sur le sujet : le complexe des filles à pd
Le pardon lui est d'ailleurs accordé de manière complètement hallucinante ! Ce côté tout est bien qui finit bien dans le meilleur des mondes m'a vraiment déplu. C'est totalement expédié, et ça renforce l'idée que le comportement de Vhif n'était pas si grave.
D'autant que les dialogues de leurs disputes s'avèrent très pauvres, les échanges entre Layla (à qui on n'accorde pas la répartie suffisante pour se défendre) et les braillements d'une violence inouïe de Vhif manquent de consistance. En bref, ça gueule mais ça n'argumente pas.

En dehors de cet aspect purement émotionnel de ma lecture, j'ai trouvé malin d'établir ce parallèle entre deux hommes aux parcours familiaux similaires. L'un vient d'une famille aristocrate et n'a aucune noblesse d'âme. Le second, malgré une existence misérable, est doté d'un fond éminemment bon. Le décalage est encore plus flagrant quand on les voit interagir avec leur "mate" (le premier veut retrouver son confort pour son propre bien-être, le second est prêt à se sacrifier pour son amoureuse).
Rejetés, maltraités et/ou abandonnés tous les deux pour une peccadille génétique (des yeux vairons pour l'un, un bec de lièvre pour l'autre), ils sont la preuve que rien n'est parfait dans le monde merveilleux des vampires à gros muscles.

Autres points intéressants présents dans ce tome (attention aux spoilers)
si Ahssaut est quasiment absent de ce volet (normal, il lui fallait un toilettage avant son propre tome), c'est peut-être pour laisser Trez reprendre un rôle plus conséquent. Je me demande comment J.R. Ward va tourner son tour de passe-passe avec ce sosie sorti de nulle part. Bizarrement, si Selena était soporifique, Thérèse est un tourbillon de franchise carrément sympathique.
La relation entre Viszs et Jane est devenue chaotique, le guerrier est en plein désamour, c'est assez triste, mais plutôt réaliste. Finalement, ça m'a suffisamment intéressée pour avoir envie de continuer à découvrir leur histoire.

Je tiens à revenir sur un point qui m'a particulièrement gênée. La misogynie ambiante, et la vision profondément raciste qui transpirent de ces pages font passer les membres de la Confrérie pour d'immondes abrutis (de toute façon, à part les muscles, aucun ne saurait concourir au pris Nobel de physique, encore moins de littérature).
Ici, les propos racistes sont dirigés contre l'humanité (ces "rats sans queue"), donc ça passe comme une lettre à la poste. J'imagine que si l'on substituait le terme "humain" contre le nom d'une communauté bien réelle, ça ne ferait plus rire personne.

Malgré tout ça, c'est une lecture très simple, addictive, follement divertissante, même si le fond m'a fait grincer des dents et la forme reste truffée de fautes. De plus, cet épisode s'avère étonnamment court pour un volume très attendu par les fans.

Tout ça pour dire qu'il est possible que j'attende encore un peu avant de jeter l'éponge.

Verdict : Décevant par rapport au potentiel de Xcor (qui ne démérite pas !) mais correct

MILADY
646 pages

LA CONFRÉRIE DE LA DAGUE NOIRE 14 : L'AMANT SAUVAGE de J.R. Ward


4ème de couverture :
"Plus rien n'est comme avant pour la Confrérie. La Société des éradiqueurs est plus puissante que jamais, mettant à profit les faiblesses humaines pour acquérir toujours davantage de moyens, d'armes et de pouvoir. Alors que la Confrérie s'apprête à les affronter, la bataille a déjà commencé pour l'un des frères.
Rhage a échappé de peu à la mort, et le sentiment d'insécurité qui l'envahit depuis le terrifie. À l'instant même où il a le plus besoin d'elle, Mary semble s'éloigner, accaparée par sa propre quête, et la seule chose qui pourrait bien les réunir à nouveau va mettre leur monde sens dessus dessous..."

Alors, doc, verdict ?
Avec sa nouvelle manie de revenir sur les anciens couples, J.R. Ward frôle souvent la correctionnelle, quand elle ne s'y vautre pas lamentablement. Apparemment, l'autrice a décidé de consacrer certains volumes à ces come-back.
Heureusement, et contrairement au retour désastreux de Kolher et Beth, cette fois, on a plaisir à lire ces retrouvailles. Normal, au vu de la popularité de Rhage et Mary (mes amoureux préférés à moi aussi).

C'est étrange, car tous ces come-back tournent autour de la difficulté de fonder une famille, condition sine qua non pour obtenir une relation pérenne.
Quand on sait que les vampires vivent plusieurs siècles, qu'un vampire "uni" est censé l'être à vie, que les grossesses vampires résultent de "chaleurs" tous les 10 ans, il y a de quoi s'inquiéter en voyant la fragilité de ces couples. Les retrouver à la limite de la rupture au bout de 2 ou 3 ans de relation casse complètement le mythe de l'amour éternel.

Ici encore, le besoin d'avoir un enfant pousse les membres de ce couple adorable (et stérile) à s'éloigner l'un de l'autre. Rhage est un hyper sensible, très immature au bord du précipice, Mary est submergée par son boulot au refuge et la misère qu'elle y côtoie.
J'ai aimé qu'on montre son désir d'adoption sans forcément le teinter d'angélisme béat. Elle songeait déjà à cette option, alors que la mère de Bitty était vivante. L'adoption est un peu trop "facile", d'ailleurs, le personnage de Bitty est trop lisse.

Autre chose d'appréciable, alors que les derniers tomes forçaient sur les scènes de sexe, sans forcément proposer de matière à côté, dans celui-ci, l'équilibre est respecté. Il y a de l'érotisme, sans que ce ne soit le propos principal. Logique, puisqu'on a déjà vécu les débuts passionnés de ce couple. Cela permet de développer d'autres intrigues et d'y mêler plus d'action.

J'ai aussi goûté au petit jeu ambigu d'Ahssaut (Asshauht, Assauh, l'autre, là !) avec Affhres (Ahfre ? putaaain !), qui apporte du piment et un côté plus vénéneux à ce tome consacré à la famille.

Enfin, on rencontre Jo, humaine fouineuse (qui partage des liens du sang avec... tadaaaam !) et probable future vedette d'un prochain volume. Avec qui la mettra-t-on à la colle, c'est le gros du suspense. Pourquoi pas l'un des salopards (la bande de Xcor) quand on aura un peu mieux creusé leur personnalité.

Bref, un tome agréable, dont on peut trouver la suite directe (l'adoption de Bitty et l'introduction de son oncle) dans les tomes 2 et 3 de la série dérivée L'héritage de la dague noire.

Verdict : Pas transcendant mais sympa

MILADY
680 pages

mardi 6 novembre 2018

LA BELLE ET LA BÊTE volume 1 et 2 de Trif


4ème de couverture
Volume 1 : Le château des mille roses

Volume 2 : L'ultime pétale
"Belle, jolie jeune fille, vit dans un hameau avec sa mère et ses deux petits frères espiègles. Lasse de cette vie rurale, elle rêve d'explorer le monde. Un rêve qui va l'amener à découvrir l'amour de la manière la plus étrange qui soit."

Alors, doc, verdict ?
C’est avec beaucoup d’excitation que j’attendais ce second volet des aventures de Mirabelle (la Belle) et de la Bête. Repoussée plusieurs fois, la date de sortie aurait pu se transformer en arlésienne (ceux qui ont poireauté des années pour le tome 2 de Songes de Terry Dodson sauront de quoi je parle), mais heureusement, cette petite attente n’aura pas entamé mon plaisir.

Déclinée en deux tomes, cette ré-écriture du conte s’est servie du potentiel érotique de l’histoire originelle pour livrer une œuvre charnelle et mélancolique. Ne connaissant pas le reste de la collection, je vais d’ailleurs me laisser tenter par une autre revisite, peut-être Cendrillon.


En privilégiant une version sombre du conte, Trif a accentué les éléments dramatiques [SPOILERS : la malédiction résulte d’un crime et non d’une simple impolitesse, le happy-end est nuancé], se détachant des « mignonneries » Disney ou Cocteau, tout en écartant l’aspect poétique/magique pour en sortir un matériau plus âpre.
Le choix d’inverser les rôles en obligeant la Belle à séduire la Bête est très intéressant. La Bête se protège, elle n’est jamais aimable ni dans une démarche galante. Mais elle est honnête et protectrice. C’est la Belle qui doit faire ses preuves pour devenir « l’Élue ».
Cela a pourtant poussé l’auteur à faire un choix en matière de point de vue, puisque les sentiments de la Bête envers la Belle ne sont jamais franchement exprimés. Si l’on comprend bien que la beauté de Mirabelle est un atout, on a du mal à discerner ce qui a fait la différence entre elle et la fée dans le tête de la Bête. Peut-être est-ce dû au besoin de Mirabelle d’apprivoiser la Bête pour lever la malédiction. Pourtant, elle ne le fait pas par générosité d'âme, mais avec une part d'égoïsme, étant tombée amoureuse du physique de la version "prince". Donc très superficiel. Son évolution est d'autant mieux amenée qu'elle surprend lorsque Belle révèle son amour alors que la situation a sérieusement empiré.

Mais je regrette deux points, dont l'un purement technique ; la police de caractère des phases narratives (hors bulles de dialogues) est illisible. Cet italique jouant sur le style "écriture à la plume sur parchemin" est loin d'être judicieux dans le genre pattes de mouche. Je devais me coller le nez contre la page pour décrypter le texte (et ce ne sont pas mes progressives qui ont aidé au décryptage). Éventuellement, en taille plus grande, l'idée aurait été sympa, mais là, non, juste non ! Je ne comprends même pas que l'effort n'ait pas été porté sur le second volume, alors que le problème avait été signalé dès le premier.
 
Le deuxième regret concerne les illustrations érotiques.
J’ai été surprise (et je l’avoue, déçue) par le décalage existant entre les scènes solitaires de Mirabelle (où la chair y est exposée crument), et celles de la Bête, y compris les scènes de couple (avec l’utilisation abusive de clairs-obscurs aux ombres parfois stratégiquement placées, ou de cadrages éloignés ou de chorégraphies softs). Cet excès de pudeur sélectif m’a un peu frustrée en tant que lectrice adulte.
D’autant qu’un clin-d’œil final semble privilégier un public féminin.

D’un point de vue purement formel, j’ai aimé le coup de crayon de Trif. C’est propre, simple et efficace. Le style réaliste très européen des personnages reste attractif (même si on retrouve ce problème récurrent de visages déformés ou peu ressemblants d’une vignette à l’autre).

Pour conclure, c’est une belle BD érotique sur un thème alléchant, avec quelques défauts, mais de belles qualités.

Verdict : Du bon boulot !

TABOU Éditions
48 pages
64 pages