mardi 1 décembre 2020

MANHWA OU MANGAS EN LIGNE, PETIT APERÇU DES SITES FRANCOPHONES EN 2020

 

Aaah, il est loin le temps où le gouvernement accusait Dorothée de nous rendre idiots avec les dessins animés japonais ! Après l'implantation pérenne du manga sur le marché français, il était logique que la technologie prenne le relai.  Le webtoon venu d'Asie a le vent en poupe, porté par une image fun, dynamique et technologique. Il est donc temps de proposer un tour d'horizon du paysage numérique VF. En matière d'offre légale, on trouve les plateformes Yurai, Webtoon, Tappytoon, et dernièrement Verytoon ainsi que les bien installées Delitoon, Coolmic et Toomics. Ces nouvelles arrivées en ont poussé certains à revoir leur politique pour rester concurrentiels. Et si les sites proposant des contenus mixtes (scan de BD et webtoons européens) ont été écartés du présent débat, l'excellent récapitulatif rédigé par Arthur Bayon en mai 2020 pourra aiguiller les lecteurs curieux.

On commence par le nerf de la guerre ; les prix, avec un balayage des forfaits proposés.

COOLMIC :

Coolmic est le plus cher de tous. Il s'agit de la version francophone d'une société japonaise : Comic Festa. Chaque épisode acheté est définitivement ouvert. Depuis son démarrage, on ne compte qu'une promo sur les forfaits. En revanche, le site propose régulièrement des réductions de 1 ticket sur un lot de séries. Il possède aussi un catalogue des versions animées de quelques uns de ses mangas.

Édit : depuis janvier 2021, un abonnement mensuel est proposé à 9,99€. Il couvre l'ensemble du catalogue MAIS ! pas tous les épisodes d'une série. À première vue, ce serait environ les 2/3, le reste des chapitres étant achetable par le biais des tickets. 

(cliquer sur l'image pour agrandir)


 DELITOON :

Chaque épisode acheté est ouvert définitivement. MAIS ! Le site perd parfois les droits d'exploitation et ne permet pas de relire sur le site web les épisodes achetés, mais c'est possible sur l'application pour smartphone. Il fait très régulièrement des opérations promotionnelles sur ses forfaits ou sur le prix des épisodes en les passant de 3 à 2 coins.

TAPPYTOON :

Chaque épisode acheté est ouvert définitivement. Je n'ai pas bien compris le système proposé en sus de chaque forfait qui accorde des points au lieu de tokens. Le site fait régulièrement des promo sur ses forfaits.

TOOMICS :

Fonctionne avec un système d'abonnement renouvelable, permettant une lecture de tous les titres du site en mode illimité (le temps de l'abonnement). Pour ceux qui préfèrent la lecture sans abonnement, le site propose des forfaits avec un système de jetons ouvrant définitivement chaque épisode acheté. Attention, les prix sont donnés en dollars américains (USD), donc il faut prendre les variations quotidiennes du cours. Au moment de la rédaction de cet article, 1 USD = 0,84 €.

 VERYTOON :

Dernier arrivant sur le marché, Verytoon (plateforme rattaché aux éditions Delcourt) propose trois forfaits. Un épisode coûte 3 coins, une fois acheté, il est définitivement ouvert. Le site propose des opérations gratuites sur un certain nombre d'épisodes. Chaque nouvel abonné se voit proposer un tarif préférentiel (j'ai fait le comparatif avant/après dans le tableau), puis retrouve des prix "normaux" lors du renouvellement. Les prix sont attractifs, même en tarif "normal".

WEBTOON :

L'ensemble du catalogue est gratuit sur le site francophone. Un système payant est à l'étude (par abonnement ou système de points), sa date de mise en place est à ce jour indéterminée.

YURAI :

Dernier site évoqué, Yurai propose uniquement un système d'abonnement.

 

Après avoir mis les pieds dans le milieu en juillet 2019, je peux aujourd'hui affirmer que le système d'abonnement (même le plus gros forfait à l'année), est de loin le plus avantageux. De juillet 2019 à mars 2020, j'ai dépensé 200€ par mois entre Delitoon et Coolmic. De la folie furieuse si on fait le calcul. On remarque que la majorité des sites propose 6 paliers à des prix relativement équivalents. La différence se fait alors sur le prix unitaire d'un épisode ou grâce à l'abonnement.

Quel contenu pour chaque plateforme, et quelles caractéristiques pour les différencier ?

COOLMIC :

Uniquement disponible sur smartphone, Coolmic propose du contenu majoritairement adulte (sexe avec censure et/ou violence). Spécialiste des mangas smurt/teen-love (érotique) et hentais (porno), le site comporte des atouts mais surtout pas mal de défauts. Fragilisée par la censure rendant certaines vignettes N&B illisibles et dénaturant celles en couleur, le nettoyage d'onomatopées en VO exécuté à la va-vite, les traductions truffées de fautes et une sélection de hentais low cost, la plateforme a dû s'adapter au goût du public français pour les soldes, afin de perdurer. Elle a d'ailleurs abandonné sans explication plusieurs séries en cours de diffusion, laissant leurs fans sur le carreau. Peu enclin à fournir l'effort qualitatif, Coolmic s'est donc engouffré dans l'opération promotionnelle récurrente, mais de trop petite envergure pour être réellement intéressante. Le manque d'interactivité entre la plateforme et sa clientèle accentue le sentiment d'être un porte-monnaie plus qu'un utilisateur. Dommage, car le service client est quant à lui accessible, très réactif et sympa. Allez, un petit effort de com, Coolmic !

DELITOON :

Privilégiant un lectorat majoritairement féminin, Delitoon propose essentiellement des shôjos hétéro ou gay, ainsi qu'une grande sélection d'isekai (fantasy historique). Disponible via l'application éponyme ou sur le web, le site détient aussi un peu de contenu adulte (sexe et/ou violence), hélas censuré et uniquement disponible sur internet. Pour lire  sur son smartphone un +18 ans, l'utilisateur doit passer par un moteur de recherche web pour retrouver le site (sauf pour quelques titres yaoi passés entre les mailles du filet). Doté d'une page officielle facebook et d'une autre page dissidente toutes deux très actives grâce à la communauté de fans bien installée, le site renouvelle très régulièrement son catalogue. Hélas, il n'a pas de section "série terminée". D'ailleurs, l'ergonomie peu pratique est l'un de ses gros points faibles. En prime, la plateforme ne permet pas de relire sur le site web les séries ouvertes dont elle a perdu les droits d'exploitation. Cela renforce le désagrément d'acheter un simple droit de lecture limité et non d'être propriétaire d'un contenu. Toutefois, les nombreuses opérations promotionnelles sont un des meilleurs atouts de la plateforme.

TAPPYTOON :

 Avec un contenu très ressemblant à celui de Delitoon, Tappytoon propose une majorité d'Isekai de bonne facture récemment arrivés sur le marché, ainsi qu'un catalogue de BL bien fourni. La catégorie mature est quant-à elle extrêmement réduite et essentiellement constituée de yaoi. J'aime bien la possibilité de se créer une bibliothèque avec ses lectures favorites. N'étant pas encore utilisatrice du site ou de l'app (même si je connais la version anglaise de certains mahwa), je ne me prononcerai pas sur le reste (notamment ce fameux système de points).

TOOMICS :

 Toomics est la troisième plateforme à être apparue sur la scène française en août 2019. En un an et demi, ses conditions de vente ont évolué, intégrant un système de monnaie interne pour acheter des épisodes en plus de ses forfaits abonnement. J'ai d'ailleurs remarqué que l'abonnement de 12 mois avait disparu. Son catalogue très diversifié fait la part belle au drama adulte contemporain avec des séries aux illustrations plutôt réalistes (mais autant censurées que chez la concurrence). On trouve aussi pas mal de séries fantastiques et d'action, ce qui draine un lectorat plus masculin qu'ailleurs. Les thèmes abordés sont plus sombres et la fantasy Isekai y est inexistante. Le site en lui-même est agréable à parcourir, l'application est pratique et le catalogue de mieux en mieux achalandé. Si je ne suis pas adepte des dramas matures (autant censurés que ceux de la concurrence), je suis ultra fan des comédies érotiques proposées par la plateforme.

VERYTOON :

Pour l'instant, le catalogue propose moins de 30 webtoons. Il a intégré de l'Isekai, du fantastique/action, du boy love et du shôjo. Je n'ai pas vu de publication érotique, mais certains manhwa d'action s'adressent à un public un peu plus mature. Pour l'instant, on reste sur du tout public. Étant très récent, le site n'est pas forcément complètement opérationnel (j'ai subi l'achat de coins non crédités, j'attends que ce soit réglé avant de valider l'expérience Verytoon). D'un point de vue ergonomique, s'il reprend des onglets similaires à Delitoon, il n'en partage pas les défauts grâce à des icônes de taille acceptable et surtout une navigation simple. La plateforme est donc claire, agréable et petit plus, elle laisse la possibilité de poster un commentaire sur la série (mais pas sur chaque épisode). Les trois premiers épisodes sont accessibles gratuitement.

WEBTOON :

THE site incontournable pour s'initier en douceur aux webtoons et manhwa puisqu'il est gratuit ! La politique stricte du site écarte d'office les contenus violents ou érotiques. Le catalogue n'est pas très varié mais il propose quelques unes des meilleures productions graphiques et scénaristiques, y compris de jeunes artistes français. Dommage que l'ergonomie de l'onglet des genres soit aussi brouillonne que celle de Delitoon, avec des icônes trop imposantes. Mais ce petit bémol est largement compensé par les qualités de la plateforme ; en plus du catalogue, j'apprécie énormément de pouvoir commenter à chaud l'épisode lu, d'avoir ma bibliothèque de favoris et d'être alertée des mises à jour.

YURAI :

Avec un catalogue d'une quinzaine de séries pour l'instant, Yurai fait figure d'outsider. La plateforme met en avant des webtoons de tous horizons, y compris français. On manque encore de recul sur l'évolution du site, mais son éthique semble vouloir s'attacher à la mise en avant de jeunes talents et une juste rémunération des auteurs. Par ailleurs, la plateforme recherche la collaboration de nouveaux artistes, ce qui peut apporter un peu de fraîcheur au genre. L'initiative est à encourager, d'autant que l'abonnement annuel est vraiment bon marché.

Après ce point des caractéristiques de chaque plateforme, il est temps de finir par :

 une sélection purement subjective (forcément, c'est la mienne 😎).

Je ne reviens pas sur les titres déjà évoqués dans mon article précédent, ici c'est juste un moyen d'en ajouter car il y a toujours des pépites à découvrir.

COOLMIC :

 Du cul du cul du cul (oui, mais censuré, hélas !).


Drôle et ultra sexy, Le laveur de femmes de Toyo est LE hentai à retenir. Le pitch de départ est simple ; un peu revanchard sur les bords, un gentil looser se fait passer pour un masseur dans les bains publics familiaux, afin d'approcher les bombasses du club de volley du lycée.

 

 

 

L'incube machiavélique de Aya Hanagatami (ou Miaya Hanagata) est le Teen Love à ne pas manquer. Il met en scène un incube poursuivant une lycéenne naïve de ses assiduités. Le trait reconnaissable de l'artiste est hélas abimé par la censure, mais ça reste une oeuvre très sympa à suivre. Attention, comme la majorité des mangas érotiques, la notion de consentement n'existe pas et chaque rapport est forcé selon nos critères occidentaux.
 

 DELITOON :


The office blind date
de Narak est l'office roman le plus fun et le moins niais que j'ai pu lire depuis longtemps. Les personnages sont sublimes et le scénario plein d'humour

 


 

Dans le genre yaoi, BJ Alex de MinGwa a fait ses preuves un peu partout où ce manhwa est passé. Intense et tendre, l'histoire de ce sextuber et de son gentil amant est avec Blood Link de Brother without a tomorrow, le boy-love incontournable.

 
 

Pour finir, il faut sélectionner au moins un fantasy romantique, et ce sera le drôlissime Miss second rôle de Ellianyang, avec son héroïne débarquée dans son roman préféré pour y jouer les spectatrices insolentes. Si le graphisme n'est pas le plus beau des Isekai, c'est l'un des plus jouissifs.

 

 

TAPPYTOON :


S'il y en a un qu'il faut découvrir sur Tappytoon, c'est The secret Queen de Lee Eun Young et son histoire de harem qui tourne au thriller romantique. Le graphisme est simple mais le héros est à tomber et l'histoire prenante.

 

 

 

 

TOOMICS :


Carton plein pour Chien de garde (Dog on patrol) de G-Goon, très hot et fun. Un gorille au coeur tendre devient le gardien d'une résidence de bombasses. Ça fait des étincelles dans le slip du chien de garde !

 

 

  

 

 

Quant à Liebling ! de Nuruk Kim, le pitch mélange les histoires de chevalerie et d'Isekai version gay ! Humour, émotion, sexe et grosse épée sont au rendez-vous.

 

 


WEBTOON :

 Trois bombes à soumettre.


En priorité, Let's play de Mongie et sa programmeuse timide, son panel de personnages hyper attachants et son graphisme net et efficace. On le débute sans trop de motivation et on se retrouve à trépigner en attendant la suite.

 

 

 

 

Dans le genre à tomber visuellement et scénaristiquement, n'oublions pas l'élue vampire White blood de Lim Lina. De vraies montagnes russes émotionnelles avec beaucoup d'action.

 


 

Pour la beauté de son graphisme, le sublime Midnight Poppy land de Lilydusk se pose là. Drama moderne entre une mignonne héroïne très terre-à-terre et un mafieux du genre torride et taiseux, c'est subtile, tendre, drôle, émouvant... Bref, indispensable !

 

 

YURAI :


Je me laisserais bien tenter par Painted dragon de Hana Ley dont le style me semble super joli et son histoire de dragon métamorphe diablement tentante,

 

 

 

 

 

et le teen-ager Solstice ville de PH Marcondes, dont les illustrations pourraient créer la surprise malgré un pitch romantique un peu classique.

 VERYTOON :

 

 

Une romance fantastique avec des changelings My lovely Woong-Ja de Yun Mi Kioung. Le style des illustrations sort de l'ordinaire, c'est ce qui m'a attirée vers ce joli manhwa.

 

 

 

Et un thriller en costume : Blind Nine de Lime, où le suspense entourant un manoir dans lequel une jeune servante est confrontée à d'inquiétants phénomènes. Les illustrations ne sont pas le point fort de cette série, mais l'histoire prend le pas sur la question.

 

 

Bref, y a plus qu'à trouver les séries qui vont te rendre dingue !

jeudi 18 juin 2020

365 DNI réalisé par Barbara Bialowas et Tomasz Mandes


Synopsis :
"Massimo est membre de la mafia sicilienne et Laura est directrice des ventes. Cette dernière ne se doute pas de ce qui l'attend lors d'un voyage en Sicile destiné à sauver son couple : Massimo la kidnappe et lui donne 365 jours pour qu'elle tombe amoureuse de lui."

Acteurs :
Anna-Maria Sieklucka, Michele Morrone, Mateusz Lasowski...

Alors doc, verdict ?
Adapté du dark erotica éponyme commis par l'autrice polonaise Blanka Lipinska, 365 DNI est un pur produit du XXI ème siècle. C'est tapageur, vulgaire, hypocrite, violent, simpliste mais en plus, ça n'assume pas.

Pourquoi c'est tapageur ? Parce que ça place le pognon en tête de gondole pour justifier l'injustifiable. Parce que ça dégouline de brillant, de paillettes (Kévin, t'es hors jeu), de corps huilés dignes d'une téléréalité tchèque.
Pourquoi c'est vulgaire ? Parce que ce film, c'est l'équivalent d'un manspreading de 2 heures. Un étalage de gros connard jambes écartées, doté de tous les clichés machistes, misogynes et grossiers.
Pourquoi c'est hypocrite ? Parce qu'on a un mec qui séquestre une femme mais ne veut pas passer pour le violeur de service. Alors il exige qu'elle se donne (de toute façon, elle n'a pas le choix), et en profite pour la tripoter parce qu'elle en a sûrement envie. Non ? Non. Après si, mais là, non.
Pourquoi c'est violent ? Parce que non, un petit sourire satisfait du devoir accompli après une fellation agressive n'efface pas l'absence de consentement clairement exprimé. Parce qu'enlever, séquestrer et peloter sous contrainte, c'est un crime passible d'une peine de prison. Ce n'est pas de l'amour, c'est juste une version romantisée du Silence des agneaux. À propos, même si ça renvoie une image passionnelle, attraper par le cou ce n'est pas un geste affectueux, c'est une démonstration de domination, et en plus, ça fait mal (testé, non validé). Et quand mon chat fait la même chose avec une clé de patte, il cherche juste à me signifier quelque chose de désagréable (change ma litière, connasse/esclave !).

Tu respires, non ? Alors arrête de te plaindre !

Pourquoi c'est simpliste ? Parce que rien n'est approfondi en matière psychologique, que l'univers dépeint est totalement factice. On sent les lacunes derrière l'esbroufe à paillettes ; celles d'une autrice inculte (merci la scène d'intro professionnelle totalement débile) qui use de facilités en récupérant toutes les idées déjà publiées en dark erotica, mais qui n'a même pas pris la peine de se documenter sur le syndrome de Stockholm. Ce récit, c'est l'archétype de l'enfilage de perles.
Pourquoi ça n'assume pas ? Parce que malgré le trope du mec qui kidnappe une femme pour obtenir des faveurs sexuelles, ça n'assume pas la pornographie du scénario. Ce n'est pas que je sois une pousse au viol, mais écrire sur un tel sujet en évitant l'acte dès lors qu'il ne concerne QUE l'héroïne, envoie un message nuisible et pas du tout crédible. L'anecdote de l'épisode "hôtesse de l'air", écrit pour glorifier l'hypersexualité agressive du héros accentue le malaise. Il sous-entend qu'une figurante mérite d'être traitée comme une décharge publique et renforce l'idée qu'en dehors de l'héroïne, l'état naturel d'une femme se réduit à glory-hole sur talons de 12. Classe.

J'ajoute qu'expliquer en quoi le pays d'origine de l'autrice influence sa vision de l'amour n'excuse pas la complaisance toute premier degré d'une production à visée internationale. Qu'on n'ait pas la même culture de la sexualité ou de ce qui est acceptable dans une relation amoureuse est un fait. L'Europe réunit des conceptions différentes voire antinomiques en la matière. Cela devient gênant quand on présente cela comme le summum de la passion.

Oui, ce film participe activement à la culture du viol puisqu'il romantise une relation abusive et fait passer un psychopathe pour le prince charmant 2.0. Un pote du fameux Christian, sans aucun doute.
Mais...
Doit-on pour autant jeter l'anathème sur une fiction qui relève clairement du fantasme ? Ne serait-ce pas un peu hypocrite de cracher sur le film en ayant conscience de son trope chelou ? Curiosité malsaine, quand tu nous tiens...
Et puis on ne peut nier la popularité du fantasme de viol sans remettre en question la notion de fantasme elle-même. Or chez celui qui le nourrit, le fantasme de viol n'est rien d'autre que le désir de faire perdre tout contrôle à son crush parce qu'on est exceptionnel.le. Cela agit comme un booster d'ego. Cela ne signifie pas que l'on cautionne le viol ou la violence dans la vie réelle.
C'est la raison pour laquelle mon opinion sur cette œuvre est assez ambivalente. Si le principe du fantasme est acceptable, le traitement littéraire et cinématographique complaisant ne l'est pas.

Parlons du film (un peu, quand-même).
Je m'attendais à un jeu d'acteur pitoyable. Sans surprise, les comédiens sont caricaturaux à souhait même s'ils ne sont pas non plus irregardables. Certes, Michele Morrone sublime le stéréotype du bellâtre musculeux suintant la violence. L'acteur (très sexy au demeurant) a sûrement fait frétiller les spectatrices en mal de petite frappe torse poil(s). Quant à la ravissante Anna Maria Sieklucka, si son visage de poupée capte parfaitement la lumière, son duck-face maniéré s'est vite avéré pénible. Un peu comme son jeu mono-expressif. Pour résumer, on a une pétasse à moustache qui se regarde rouler des mécaniques et une limande botoxée fan du petit air satisfait. Soit deux personnages adeptes de la démarche féline au ralenti (moi, ça me rappelait un peu les zigzags sur chaussures à bascule de mes jeunes années mais on va encore me traiter d'alcoolique).

Mais je reconnais qu'on peut difficilement nier l'alchimie entre les deux acteurs, ils s'accordent plutôt bien dans le genre beaux à voir sans activer le son. La tension sexuelle est bien restituée, loin des coquineries aseptisées au gel hydroalcoolique proposées par les américains. J'y ai été d'autant plus sensible que le film s'adresse clairement à un public féminin, et que les prises de vue focalisées sur l'acteur plongent par procuration la spectatrice au cœur de l'action. Chaud ! J'ai lu ici et là que les scènes de sexe étaient pornographiques. Alors je ne sais pas si Mon curé chez les nudistes peut être considéré comme tel, mais il faudrait revoir la définition. Car de parties génitales, il n'y a point. Je le sais, j'ai tout passé au ralenti. Oui. Au ralenti. Plan par plan. Putain, y a rien qui dépasse. En revanche, la gestuelle plus "franche" du coup de reins (et vive l'école du mime avec des pipes marteau-piqueur) relève bien de l'esthétique porno. Ceci dit, en tant qu'adulte pas vraiment prude, ça m'a un peu gonflée d'être privée de full frontal. Halte à la censure, on veut mater des micro-pénis, nous aussi !

Laura, penche la tête sur le côté, steuplaît, c'est pour vérifier un truc...

Et sinon...
J'ai buté sur le couple improbable de Laura et son ex Martin (la caricature du gros beauf). Aussi crédible que Megan Fox en ménage avec Édouard Balladur, l'analyse du couple est totalement à côté de la plaque tant l'héroïne le méprise. Pourquoi rester avec ça ? Pour le sexe ? Nan, il préfère mater le foot à la télé. Pour son humour ras-le-caniveau ? Mais bien-sûr... Pour le pognon ? Bingo (et hop, analogie avec les putes d'Europe de l'Est) ! Bref. J'ai aussi buté sur les épisodes shopping (spéciale dédicace à Pretty Woman avec la musique entraînante et les multiples essayages) tellement malvenus dans un contexte dramatique qu'ils semblaient issus d'un autre film. À moins de chercher à confirmer combien les polonaises étaient des garces vénales, je n'ai pas bien compris l'enjeu de ces scènes qui semblaient hors sujet. Incompréhension culturelle ? Mouais. J'ai aussi buté sur le dîner aux chandelles aux dialogues ridicules, sur les fausses tentatives d'évasion, sur l'inconsistance des personnages secondaires, et j'ai eu envie de buter Massimo environ 1253 fois...

En revanche, d'un point de vue esthétique, c'est beau, bien filmé, bien cadré, bien éclairé, bien décoré, bien musiqué.

En bref, du faux porno glamour avec un petit côté addictif honteux qui affole le monde. Merci Netflix.
Point positif, ça permet un entraînement intensif des globes oculaires.

Verdict : Moins explicite qu'un porno.

PS : y a que moi qui trouve que l'actrice ressemble fortement à Kate Beckinsale sur l'affiche (et là, tout le monde scrolle vers le haut pour revoir l'affiche) ?

jeudi 26 décembre 2019

PRINCESSE SARA 12 : COUPABLE ! d'Audrey Alwett, Nora Moretti et Marina Duclos


4ème de couverture :
"Sara vit dans la clandestinité à New-York. Il lui est difficile d'accepter ce qui est arrivé à James et elle survit tant bien que mal dans le bidonville de Five Points. Mais l'étau se resserre et la fuite n'est pas une solution durable. Bientôt, Sara doit se retourner et faire face à ses accusateurs. Elle qui a déjà tout perdu risque bien de devoir miser la dernière chose qui lui reste... sa vie."

Alors, doc, verdict ?
J'aurais dû reprendre chaque tome pour en livrer un avis, mais je profite de la sortie récente du douzième épisode pour balayer rapidement cette saga magnifique, proposée par trois artistes de talent, et dont j'avais rédigé un petit avis sur le premier volume, à retrouver ici.

Outre l'histoire originelle (épisodes 1 à 4) qui a sans aucun doute marqué des générations d'enfants (d'abord les lecteurs avec le roman de Frances Hodgson Burnett publié en 1888, puis les fans de l'animé Princesse Sarah diffusé dans les années 80), les autrices se sont affranchies du matériau d'origine en y mêlant des éléments industriels imaginaires. Ces automates serviront de base scénaristique pour construire la suite des aventures d'une Sara devenue adulte et de ses amis.

Après de multiples péripéties qui leur ont fait traverser le globe, permettant à l'illustratrice d'offrir une palette de décors somptueux à nos yeux émerveillés, nous retrouvons notre couple de héros accusé de tentative de régicide en mauvaise posture.

Ce tome, comme ses prédécesseurs, est un enchantement. Le trait élégant, précis et glamour de Nora Moretti, la mise en couleur tour à tour flamboyante ou plus nuancée de Marina Duclos, mettent parfaitement en valeur le scénario rythmé d'Audrey Alwett, notamment les personnages qu'elle a su faire avancer vers l'âge adulte. Chaque artiste est un rouage complémentaire au service d'une oeuvre délicieuse, dont les qualités ne se démentent pas au fil des tomes.

Particulièrement sensible aux illustrations, je suis toujours épatée qu'un.e artiste soit aussi doué.e pour les personnages que pour les décors, en leur apportant le même soin minutieux. C'est plutôt amusant, car je retrouve ce même talent chez Jenny (Comme un garçon) et chez Valp (Les fantômes de Neptune). Une nouvelle génération d'artistes à suivre avec attention !
*
Princesse Sara 12, éditions SOLEIL

Largement influencée par l'esthétique Art Nouveau, le courant steampunk et les romans de Jules Verne, cette bande dessinée, romanesque à souhait, évoque en parallèle des messages intéressants sur la tolérance, la course à l'armement et la condition féminine en cette fin de 19ème siècle. D'ailleurs, Sara n'est pas le seul personnage à posséder des qualités d'héroïne. Dans leur genre, Lottie et Lavinia s'avèrent être aussi intrépides, indépendantes et courageuses.
Quant à la romance avec James, si je la trouve un peu tiède, elle reste cohérente par rapport au caractère pudique de Sara et plus impétueux du beau blond.

En bref, ce tome achèverait un nouveau cycle que cela ne m'étonnerait puisqu'il clôt l'arc narratif autour des accusations de régicide. Sara étant un personnage qui s'est réinventé à plusieurs reprises, je ne doute pas que la suite de ses aventures soient aussi passionnantes qu'elles l'ont été jusque-là.

Petit bonus, une planche de stickers a été ajoutée en fin d'ouvrage, et même si je ne risque pas de les ôter de mon exemplaire (pas touche à mon exemplaire !), j'ai trouvé l'idée très sympa.

Verdict : sublime ! 💖

SOLEIL (collection Blackberry)
48 pages

mercredi 25 décembre 2019

La vie, les réseaux sociaux, les mouettes...

Telle une plante carnivore, ce blog a besoin de sa dose de tripes au vinaigre. Rare cette année pour des raisons éminemment légitimes (flemme, feignasserie, mieux à faire/ne rien faire), je réalise en ces lendemains de fêtes vous avoir épargné mes petites vacheries. Aussi ai-je reçu l'ordonnance de m'abandonner à des instants de pure mauvaise foi comme assurance d'une bonne santé digestive, avant de commencer l'année 2020 avec des cœurs et des paillettes plein l'écran.
Les réseaux étant ce qu'ils sont (In Facebook, we trust), bienvenue dans un monde ou chaque nouveau statut privé, public ou pro repousse les limites du facepalm.

Tout d'abord, je ne pouvais commencer cet article sans manquer de soulever une vaguelette d'indigna-gna-tion auprès de tous les parents.
Chère collègue, pour 2020, je me souhaite de ne plus entendre le prénom "compte triple au scrabble" de ton gamin (plus souvent entendu que le mien en plusieurs décennies) ! Ai-je vraiment besoin de savoir que T. joue les petits dictateurs à la maison, que K croit encore au père Noël à dix ans ou que R. et K. font caca mou les nuits de pleine lune ? Non. Non merci. Non mais vraiment, non. Naaan, mais en vrai, tu veux que j'applaudisse les exploits ou tu cherches juste à rentabiliser ton don pour les prénoms à la con ? Tu ne peux pas dire "ma fille" ou "mon fils", "mon grand" ou "ma plus jeune" comme tout le monde ? Tu ne peux pas arrêter de me parler de lui/d'elle ? Tu ne peux pas arrêter de me parler tout court ?

Les réseaux n'ayant pas été en reste, j'ai croisé un certain nombre de statuts WTF-sa-mère-en-tongs-au-Fouquet's qui me permettent aujourd'hui d'en proposer un florilège amusant ! (toi aussi, amuse-toi en les recensant) Certes, je me suis souvent demandée si c'était douloureux d'être autant à côté de la plaque où s'il y avait un lot à gagner au bout de dix conneries postées.

Principe numéro un : le lecteur est chiant.
Ah tiens, le lecteur n'aime pas être frustré, ce con ! Le lecteur en a un peu marre de commencer une série que l'éditeur arrête en cours de route (merci J'AI pas LU et consorts). Alors de plus en plus souvent, le lecteur, il attend l'intégrale avant d'acheter, il sélectionne les tomes indépendants, ou il privilégie les one-shots. Méchant lecteur ! Comment ça, les multirécidivistes du tome 1 peuvent aller se noyer dans de la mayo périmée (haro sur cet auteur haineux qui sort plusieurs séries et n'en termine aucune).

Principe numéro deux : être pédant ne garantit pas le succès.
Que celui qui n'a jamais vomit sur: les auteurs US en promettant à leurs fans une éviscération à la fourchette me jette son premier Bescherelle.
Posture de l'éternel connard élitiste, comparant le dernier hit littéraire avec sa production de niche totalement perchée. L'auteur pédant aime bien ricaner en compagnie de ses pairs. Ça donne de la discussion high level Ta-race-la-prétention, à coup de verbe glorieux et style rococo classieux. Rions de ces gueux, mes braves, et sus à la vulgarité d'un succès populaire. En vérité, tout vert de jalousie, le pédant est prêt à toutes les bassesses, y compris s'essayer à l'écriture du bousin pour connaître sa minute de gloire. Manque de bol, même en version molle, sa prose reste boudée. Quand ça veut pas...

Principe numéro trois : délègue aux autres ce que tu répugnes de faire toi-même.
Aaah, la délégation des tâches... Qui n'a jamais lâché une horde de fans déchaînés aux trousses d'un lecteur récalcitrant, n'a rien vécu. Cette technique a même un petit nom : l'affichage public ou l'art de la délation sans y toucher. On publie un statut tout énervé avec suffisamment d'indices pour identifier le malotru (qui a osé détester le roman de toute une vie) ou on copie des phrases entières du commentaire délictueux. Puis on attend en buvant sa petite tisane que la horde ait débusqué l'hideux criminel du verbe (non, son synonyme n'est pas cruciverbiste). Et voilà, une version 2.0 de chasse-à-courre toute prête à être consommée. À taaable !

Principe numéro quatre : flagelle-toi, ça t'apportera peut-être des like en plus.
Appliquée par l'auteur qui s'indigne de déchirer les ventes avec de mauvais textes, alors que son nom de plume "sérieux" cultive le néant commercial, cette pratique a son petit charme. Aller jusqu'à se dénigrer parce qu'on donne au public ce qu'il a envie de lire, j'ai envie de dire que ça mérite même un bon coup de pelle dans la tronche pour réinitialiser le système.

Principe numéro cinq : ne regarde jamais dans la gamelle du voisin !
Allez, avouez, combien de lectrices comme vous et moi et de blogueuses sans influence ont méchamment gloussé en assistant à la Chute de la maison Usher, pardon, à la fin de certains partenariats avec les éditeurs ? C'était drôle, ça chialait dans tous les sens, malgré des bibliothèques entièrement constituées de livres gratos. Soyez heureuses, bande d'ingrates, Dobby, lui, n'a reçu qu'une vieille chaussette pour obtenir sa liberté !

Principe numéro six : plus je menace les autrices récalcitrantes, plus leurs "copines" parlent de moi.
Lorsque museler toute critique par l'intimidation finit par payer, ça donne envie de sortir la grosse artillerie ou le Dalloz rangé au grenier. La chute de cette histoire n'est guère glorieuse, puisqu'elle tend à démontrer qu'à user de méthodes dignes d'un proxénète bulgare, l'on obtient un consensus mollasson d'autrices en mal de ventes. Et qu'importe l'efficacité réelle du service (tu chercheras toi-même duquel il s'agit) qui ne peut pas être prouvée scientifiquement, pourvu que les mécontentes brûlent silencieusement en Enfer...

Allez, il me reste une vraie chronique à rédiger avant le nouvel an, donc on referme la parenthèse et on sourit aux mouettes.

jeudi 12 septembre 2019

Et bim, les doigts dans l'engrenage ! Quand tu plonges dans la toile des webtoons.

(clique sur la photo pour élargir, mon talent te sautera aux yeux. Ou pas.)
Si tu as facebook et que tes centres d’intérêts se portent sur la page de certains artistes graphiques, tu es sûrement déjà tombé.e sur une publicité pour des webtoons (manhwa), c'est à dire des BD formatées dès leur conception pour être lues en ligne. Ces derniers mois, en concentrant sa communication sur les réseaux sociaux, l'une des seules plateformes francophones est allée débusquer ce nouveau lectorat dont tu fais peut-être partie.
Pourvu d'une connexion internet pas trop dégueulasse et d'un amour immodéré pour la BD kawaii et romantique, le pigeon (en l'occurrence, une pigeonne) a docilement suivi les petits bouts de pain jusqu'à l'antre du grand méchant loup. Même qu'elle s'est faite plumer comme une dinde à Noël, et avec le sourire. Un comble !

La méthode d'hameçonnage est simple ; la page facebook du site poste en publication sponsorisée les premiers chapitres d’une BD (principalement sud-coréenne), pour appâter le lectorat. En livrant de nombreuses planches, la plateforme enchaîne ses lecteurs/lectrices à l’histoire. L’efficacité de ces sagas à rallonge, c'est l'immersion immédiate au cœur de l’action. Quitte à opérer des flash-backs plusieurs chapitres plus loin, afin de replacer ces scènes au sein d’un contexte global.
Pour ma part, le piège s’est refermé lorsque j’ai lu les premiers chapitres d’Ombres et Lumières. Le graphisme épuré, la beauté des personnages, l’intrigue romanesque, tout semblait réuni pour me plaire.
 Ombres et Lumières de Ryuhyang & Heewon

Inscription faite, j'ai alors découvert du contenu de toute sorte. Y compris adulte.
Contrairement à d'autres lecteurs, adeptes du tout gratuit sur le net grâce aux scantrad (c'est pas très légal, tout ça), j'estime que tout travail mérite salaire. Aussi me suis-je d’abord laissé tenter par un petit abonnement, débloquant ainsi des épisodes supplémentaires. Hélas, les coins (monnaie utilisée sur le site, et non l'ignoble angle de table basse) glissant entre les doigts comme un chat cherchant à esquiver son traitement vermifuge, j'ai dû passer à la vitesse supérieure et m'offrir un abonnement grand luxe.

Et c'est là que je place mon premier (putain) de warning !
Quand on commence la lecture sur ce genre de site, on n’imagine pas combien le fait de pouvoir enchaîner plusieurs épisodes, voire la série entière peut être addictif ! L’effet est un peu le même qu’ouvrir un paquet de chips quand on est au régime. On se dit « allez, une ou deux supplémentaire » et paf ! On s’aperçoit que le paquet y est passé et qu’on a déjà attaqué l’emballage…
Eh bien l'effet est à peu près le même. Au début, on se dit : "Ok, je découvre les premiers épisodes gratuits, juste pour voir, comme ça, pour passer le temps, j'y reviendrai plus tard, peut-être ce week-end". Et puis on se surprend à scroller comme une furie pour découvrir la série complète à 3h du matin...

Jusqu'à présent, je n'avais trouvé qu'une seule plateforme francophone légale connue sous le titre Delitoon.
Depuis août 2019, une nouvelle plateforme, Toomics, permet une lecture illimitée sur une période pré-déterminée. Les abonnements proposés sont très avantageux. Toutefois, sa création récente ne lui permet pas de proposer un catalogue très fourni. Quant au nombre d'épisodes disponibles par série, il reste trop insuffisant pour convaincre de sauter le pas. À voir dans quelques mois si le site parvient à acquérir les droits de bonnes séries...
Enfin, je viens d'en découvrir une troisième, uniquement disponible sur smartphone (donc pas de lien direct vers une plateforme), Coolmic, dont les forfaits semblables à ceux de Delitoon, s'avèrent en réalité bien plus chers à l'usage (pour résumer, un épisode coûte 7 points au lieu de 3).
Réservé à un public plutôt adulte, Toomics et Coolmic proposent essentiellement du contenu érotique et hentai, alors que Delitoon s'adresse plus à un jeune public féminin adepte de shôjo et de fantaisie.

Comment ça fonctionne, en général ?
Les plateformes ont adopté un système commun. Chaque série présente 1 à 4 premiers épisodes en lecture gratuite. Cette mesure offre un bon aperçu du graphisme et de l’histoire, évitant la déconvenue une fois la série achetée. Les épisodes suivants sont payants.
Un nouvel épisode (ou chapitre) est posté chaque semaine. Le catalogue de nouvelles séries s'enrichissant quasiment tous les jours, on a vite fait d'exploser le budget initialement prévu.

Combien ça coûte ?
Chez Delitoon, ça coûte 3 coins/épisode (entre 33 et 60 centimes, suivant le forfait choisi). Chaque jour, une série est mise à l’honneur grâce à la gratuité temporaire d’une quinzaine de ses premiers épisodes. Un compromis qui peut sembler un peu maigre lorsqu’une série en comporte plusieurs dizaines. Un système de freetime débloque aussi temporairement certains épisodes supplémentaires. Pour ceux qui n’ont pas de gros budget, ça reste une alternative sympa, on a moins le sentiment de se faire plumer.
Toomics utilise un système d'abonnement permettant une lecture illimitée de tout le site, sur un laps de temps donné. En bref, vous n'achetez pas le contenu mais un simple droit de lecture temporaire. Pour donner une idée des prix, leur plus gros forfait à 47.88 USD (environ 43€) permet un accès à tout le contenu pendant 12 mois. Ça donne du 3.59€ / mois, ce qui reste super raisonnable.
Coolmic pratique des forfaits très semblables à ceux de Delitoon, mais le prix par épisode grimpant aux alentours de 70 centimes par chapitre (entre 5 et 7 tickets), on a vite fait de cramer son forfait.

Quel contenu peut-on y trouver ?
Plusieurs genres sont proposés : romance hétéro ou LGBT, fantastique, adulte - horreur/hentai (avec la bonne vieille censure des parties génitales), sport, etc. La majorité des séries tournant autour de la littérature sentimentale. La longueur des séries est assez variable, j’en ai lu qui faisaient une quinzaine d’épisodes, d’autres plus de 100. Alors oui, c’est un sacré budget à la longue. Mon erreur aura été de débuter ma « consommation » en période de vacances. On est plus enclin à enchaîner les épisodes quand on a du temps devant soi.

Perso, j'avais une préférence pour Delitoon et ses séries fantastico/romantiques (quelle surprise) en costumes. Aujourd'hui, je me tourne plus vers l'aspect très polisson de Coolmic.
Bon à savoir : Il ne faut pas s'attendre à de la réalité historique avec les séries en costumes. Bourrées d'anachronismes et de fantaisie, elles réinventent une certaine vision de l'occident du XVIII, XIXème siècle. Mais c'est une explosion de couleurs et de détails qui ravit l'oeil à chaque fois. Les costumes d'apparat militaires y sont particulièrement réussis. Dans le genre, On peut citer Adonis, Dites-moi Princesse, L'impérieux destin du Dr Elise ou Lucia. J'ai croisé un historique très drôle Miss second rôle, avec le trope rabâché de l'héroïne projetée dans un roman pour incarner un personnage (l'originalité étant d'avoir cette fois intégré l'héroïne dans un rôle secondaire, venue là en "touriste catastrophe").

 Dites-moi princesse de Spoon & Plutus
J'ai aussi un faible pour leurs comédies romantiques un peu trop sucrées pour être honnêtes. Les office-romance, qui emploient le trope du patron trop trop beau, amoureux de la gentille employée. À ce jour, j’ai débloqué un certain nombre de séries, certaines m'ont plu, d'autres déçue, mais l'avantage, c'est l'arrivage régulier de nouveautés.

Pourquoi je suis tombée dedans sans espoir de retour ?
Il faut comprendre comment fonctionne le site pour en saisir la dangerosité. En ouvrant certains des liens qui suivent, tu plonges dans une lecture simple, rapide, qui se nourrit de ton avidité à connaître la suite. Et quand tu penses que tu as fait le tour, bam ! la plateforme met en ligne une rafale de nouvelles séries. Tout est fait pour que dans le lot, il y en ait une qui te plaise. C'est diabolique !

Focus sur mes coups de coeur.

Sur Delitoon.

Ombres et Lumières. Mon premier "historique". L'histoire : une jeune domestique est envoyée à la place d'une aristocrate pour être mariée avec un chevalier sadique. J'ai aimé la simplicité des illustrations, même s'il y a mieux dans le domaine. Mais ce qui m'a convaincue, ce sont ces personnages forts, une histoire prenante, mêlant actes de courage, passé mystérieux, romance et action. L'une des seules sagas achevées sur le site (104 épisodes). À retrouver ici

Pseudo. Il s'agit d'un thriller pornographique. Une femme attire des proies par le biais de faveurs sexuelles. Les illustrations sont explicites et violentes (pas de censure), le graphisme est efficace, les personnages intéressants, les enjeux encore plus intrigants. Cette série comprend plusieurs saisons, la saison 1 constituée de 15 chapitres est en ligne. Je viens d'apprendre que la deuxième ne verrait jamais le jour. Dommage, cela s'arrête en pleine montée de tension. À découvrir ici

La garderie des beaux garçons. Ce n'est pas une blague, le titre illustre le trope. Au début, j'ai cru à un boy's love avec une telle affiche, alors que non,puisque le fil suit les aventures d'une jeune institutrice au milieu de ce groupe d'hommes. Si le graphisme est léché, je ne suis pas forcément fan des visages. Mais l’humour est efficace et l’histoire très sympa. Elle vient de se clôturer après 54 chapitres. À lire ici

Adonis. Une lady Oscar rouquine en pleine formation militaire ! Le trope de la réincarnation suit cette fois les pas d'une guerrière qui a fait le serment (avant de mourir une première fois), de se mettre au service de son ennemi de toujours. Les illustrations détaillées, le style et les perso super beaux, l’intrigue passionnante, tout est fait pour séduire. La saison 1 (100 épisodes) est livrée, la suite se fait gentiment attendre. À adorer ici

L'impérieux destin du Dr Elise. Une autre histoire de réincarnation qui s'attache cette fois aux pas d'une chirurgienne de génie réincarnée dans un univers parallèle moins moderne. Très inspirée de l'époque napoléonienne et du faste des Tsars, les illustrations sont une merveille et les décors à tomber, même si je trouve le visage de l'héroïne trop juvénile. L'histoire est passionnante, c'est un peu Urgences chez les Tsars avec cette saga. À aimer ici

Sur Coolmic.


Un pompier aux doigts de feu de Kawano Tanishi
Sôma et Ryô se connaissent depuis des années. Le premier est pompier, la deuxième le trouve trop charmeur à son goût. Lorsqu'un concours de circonstances oblige la jeune femme a accepter l'hospitalité de son camarade, elle sait déjà qu'il lui faudra luter pour résister au charme brûlant de ce soldat du feu.
Illustré en N&B, dans un style net et précis, c'est clairement l'un de mes mangas préférés. Bien-sûr, culture nippone oblige, on retrouve les éternelles scènes de sexe forcées. C'est une constante du hentai, semble-t-il. Si ça heurte mes convictions personnelles, les vignettes n'en restent pas moins super sexy et l'histoire plaisante.

Derrière les barreaux de leur perversité (Ori No Naka, Watashi Ha Midara Ni Kowasareru) de Miaya Hanagata.
Une jolie orpheline est adoptée par une famille des environs. Elle n'imaginait pas qu'en franchissant le seuil du manoir, ses nouveaux frères se serviraient d'elle pour assouvir leurs plus sombres désirs...
Entrant dans la catégorie Teens-Love du site (romance avec des scènes de sexe explicites), cette histoire n'est pas à mettre sous tous les yeux. Le titre annonce clairement la couleur. Manipulation, avilissement, viol, l'auteur appuie à fond le côté malsain du récit. Les illustrations N&B sont très fines, détaillées, et c'est surtout le coup de crayon de Miaya Hanagata qui ajoute la touche de perversité finale. Pour lecteurs adultes et avertis.

Il est trop jeune, est-ce un crime ? de Yue Satomi
Un baiser volé par accident et une révélation plus tard, la mignonne Akari se retrouve face à un dilemme. Même si Tôya ne lui a pas dit non, a-t-elle le droit d'entamer une relation avec ce beau collègue ?
Un de mes coups de coeur, car malgré un sujet polémique, c'est traité avec humour, douceur et beaucoup de pudeur. Les illustrations couleur sont mignonnes, même si elles ne sortent pas des sentiers battus.

Sur Toomics.

Les filles d'à côté (Close as Neighbors), soit les chamailleries coquines de deux voisins qui se redécouvrent. Un jeu sentimental de "fuis-moi, je te suis", émaillé de beaucoup de scènes chaudes et de tergiversations sentimentales. On peut découvrir les premiers épisodes ici.

M Kang de Kim & Oh
Un employé de bureau au physique disgracieux finit par rencontrer sa fée marraine sous la forme d'une sympathique garce. Sans être révolutionnaire, j'aime bien ce côté Cendrillon au masculin (même si la transformation n'est pas hyper miraculeuse non-plus). À lire gratuitement (youhouuu !) ici

Les bémols concernant la plateforme Delitoon :
Les reproches que j’aurais à formuler ne portent que sur l’aspect technique. Tout d’abord, l’absence d’indication quant au nombre final d’épisodes. Même si le site sélectionne (soi-disant) des séries « complètes », afin d’éviter l’interruption de publication particulièrement frustrante, un compteur du genre : épisode 23 sur 104, serait tout de même pratique.

Je regrette aussi de ne pouvoir ouvrir plusieurs fenêtres à partir de la page où je me trouve. Le site a bloqué l’ouverture des liens secondaires, obligeant à retourner en arrière, ou aller sur la page d’accueil pour accéder à un autre contenu. Ce serait pourtant plus pratique pour naviguer d’une série ou d’un épisode à l’autre, sans perdre la page de lecture en cours.
Même si j’ai contourné le problème en enregistrant chaque série dans un fichier de mon navigateur, ce système reste assez rigide et peu pratique. Par exemple, il ne garde pas forcément en mémoire mon historique, et m’oblige parfois à me reconnecter alors que je l’étais déjà dans une autre fenêtre.

Troisième reproche, l’impossibilité de poster des commentaires sur les séries, et pire encore, l'absence d’interactions sur le blog. Le site poste quelques infos (trop superficielles pour satisfaire les fans) mais il n’y a pas de forum permettant aux lecteurs d’échanger sur leurs séries préférées.

Pas encore abonnée à Toomics, j'attends qu'ils aient atteint un nombre d'épisodes suffisant pour chaque série avant de me lancer. De nombreuses séries ont fait l'objet d'une traduction avant d'être "licenciées", malgré cela, la plateforme n'a pas mis en ligne tous les chapitres déjà traduits. La rapidité de lecture de ces BD et les capacités de consommation d'un web-lecteur vont obliger le site à enrichir sans cesse son catalogue, au risque de perdre des lecteurs, lassés d'attendre leur épisode hebdo.

Quant à Coolmic, je trouve dommage qu'ils n'aient pas envisagé d'ouvrir une plateforme sur le web. Et même si je milite pour une juste rémunération des web-auteurs, leurs prix restent trop élevés, ce qui oblige à s'auto-réguler en sélectionnant les séries à suivre, pour éviter la banqueroute.

En conclusion.
Un peu comme le jeu, le webtoon a quelque chose de foncièrement addictif. C'est pourquoi après les reins, vendre mon sang devrait m'aider à acheter des coins/tickets... Je tâte chaque nouvelle série du bout du clic, et bien souvent, je me retrouve prise au piège. Pour qui aime les manhwa romantiques ou érotiques (en coréen, le terme manga est l'équivalent du hentai, oups !), c'est le Paradis.

Edit ; depuis un an, le paysage a un peu évolué, de nouvelles plateformes ont émergé, aussi un nouvel article en fait le point ici .

Et toi, tu plonges quand ?

samedi 12 janvier 2019

Qui a écrit XXL sur mes fringues, bordel ? Quand l'assassin était dans la cuisine, avec un chandelier.

Tess Holliday, modèle plus-size

J'avoue, le thème de cet article me trotte dans la tête depuis quelques semaines. À une période où il fait bon prendre de bonnes résolutions, j'ai décidé d'arrêter mon choix sur celle-ci. Cesser de suspendre ma vie à une hypothétique perte de poids.

Mettons immédiatement les choses au clair et en chiffres. Je fais un 44, je mesure moins qu'un nain de jardin, donc oui, je suis grosse. Obèse, même, si on s'en tient aux normes de l'IMC. Pas genre vaguement ronde comme les mannequins plus-size qui te font passer un 40 fillette pour de l'obésité morbide. Et non, je n'aime pas être grosse. Je ne me plais pas dans ce corps qui me fait grave chier. Entre certains bouts de moi qui ne rentrent pas dans des vêtements standards, et ce corps qui décide de me lâcher quand je désire sincèrement le bouger, je ne trouve aucune satisfaction à peser autant qu'un piano à queue.

Attention, hein ? Ne faites pas de cet auto fat-shaming, une généralisation. Je n'irais jamais reprocher à une femme d'être en surpoids. C'est son corps, son vécu, ses blessures ou ses joies, elle en est l'unique propriétaire.

Un peu d'histoire...
C'est à l'entrée dans l'adolescence que j'ai pris conscience qu'une fille DEVAIT avoir des complexes. Sans quoi, ce n'était pas une fille, juste un blob à qui on aurait collé une tresse. Je dois cette grandiose découverte à ma meilleure amie de l'époque ; hyper sportive, hyper canon, et hyper dans la comparaison de nos cuisses (Laure, si tu me lis, je t'embrasse) et à ma mère qui a mal vécu les 10kg de sa grossesse (M'am, je t'aime aussi !). Par conséquent, j'avais l'obligation légale de me construire sur l'idée qu'une femme se réduisait à un corps craignant de grossir.
J'ai donc fait tout ce qu'on attendait d'une gamine qui s'en battait les couettes avant LA révélation. J'ai grossi, et suis devenue un peu rondouillette. J'étais pourtant sportive depuis l'enfance, sans pour autant avoir acquis les muscles de Mauresmo ou la grâce de Pietragalla (la nature, cette garce taille zéro qui fait un doigt d'honneur permanent).

Adulte, mon job a rectifié le tir. En deux mois, j'ai viré mes années "petit boudin" et me suis réincarnée en pro du triathlon. Je ne bouffais rien le matin (footing après corn-flakes du matin = chagrin), léger le midi (vade retro pâtisserie et fromage) et pas mieux le soir. Le week-end, je ne me privais de rien (dans des proportions raisonnables) puisque je glissais un footing entre les repas. En semaine, j'avais même mes petites victoires en faisant un peu d'anorexie le temps d'un ou deux repas. À ce régime que n'importe quel nutritionniste trouverait débile mais qui est LA SEULE solution chez moi pour perdre du poids, j'ai donc fini par frôler le 36 (il n'y avait plus de jupe à cette taille - véridique). Bref, j'étais à l'aise avec mon corps, au taquet professionnellement, jusqu'à la rencontre avec l'homme qui allait devenir ma moitié de pizza. Car mettez deux gourmands ensembles et vous obtenez une catastrophe calorique.

Des années de mariage, certains "accidents de la vie" et un boulot chronophage ont sonné le glas de mes activités sportives intenses. Trente kilos gagnés plus tard, j'ai enfin arrêté de croire au côté provisoire de la situation. Puisque je ne peux pas les cacher, ces foutus kilos, il est donc temps de les assumer. S'ils disparaissent un jour, ce serait mieux, ne nous leurrons pas. En attendant, il est indispensable que je les vive sans souffrir.

Les conséquences du surpoids.
Que la grosse qui n'a jamais couiné pour monter deux étages me jette sa dernière part de tarte. Car oui, avant, je les grimpais deux par deux, ces marches. Aujourd'hui, je préviens le service de réanimation avant de les monter.
Je crois que c'est le pire pour quelqu'un d'actif et de sportif. Voir son corps refuser d'accomplir certains actes, comme un simple footing (mal de bide assuré et plus si affinités). Les articulations aussi en prennent un coup. Genoux, chevilles, voute plantaire, dos, même le sommeil trinque (on ronfle on se sent engoncée quand on dort sur le côté). Une fois fragilisé, le corps se flingue au premier coup de stress. Et ça reporte d'autant la reprise d'une activité sportive. Un véritable cercle infernal.
Je n'évoquerai pas l'hypertension, le risque cardio-vasculaire ou diabétique. Une épée de Damoclès que je préfère pousser sous un tapis. Après-tout, demain, je peux être percutée par un bus. Ne parlons pas des difficultés à se mouvoir dans le couloir d'un bus touristique, passer les tourniquets du métro, etc.
Et en cas d'attaque zombie, je sais déjà que je serai la première à mourir à défaut de courir.


Moralement, comment ça se passe ?
Tout d'abord, j'en ai marre de cette bienveillance mielleuse des gens minces. Ras-le-bol de ceux qui s'improvisent coach et affirment ne vouloir que mon bien en m'incitant à faire du sport ou à faire gaffe à ce que je mange. Pour leur information, je fais de la natation une à deux fois par semaine. Et j'ai beau ressembler à un cachalot, tous ceux qui s'attendaient à ce que je nage comme une enclume en ont été pour leurs frais. Mon surnom, c'est encore le hors-bord. Je pratique la marche quotidienne aussi. Alors oui, sinon, je bouffe. Mais j'ai envie de hurler à la face de ceux qui tiennent coûte que coûte à faire le compliment qui tue "pourtant, tu as un joli visage" (quel gâchis !), de ceux qui partagent un avis non sollicité sur ma personne "Dis-donc, tu as grossi, toi", de tous ceux que je soupçonne de juger mon physique non par sollicitude mais pour se rassurer à cause de leur propre vie de merde.

Et je fais une overdose des articles body-shaming sur la cellulite des actrices, ou leurs variations pondérales. Que dire aussi de ces pubs pour perdre du poids ou faire de l'exercice qui envahissent nos écrans actuellement ? Saison oblige, la société veut que le gras de Noël disparaisse. Pas moi. Si je veux maigrir, c'est pour moi, pas pour faire plaisir aux autres. Que l'autre me réduise à mon corps ne mérite pas que je m'intéresse à ce qu'il a à dire. Dois-je être jalouse de ces dindes incultes qui meublent la téléréalité ? Ces nouvelles idoles au physique spectaculaire et à la connerie interstellaire ? C'est ça, l'exemple que je dois suivre pour être admirée ? Ai-je seulement besoin d'être admirée par des inconnus ? Non.

Bien-sûr, comme toutes les grosses, j'ai besoin de me référer à des modèles positifs. Car même si j'ai une conscience aiguë de ma personne, et une self-estime suffisante pour avancer dans la vie, ça fait du bien de savoir que "curvy" n'est pas forcément synonyme d'imbaisable. Toutefois, pour une Ashley Graham, ou une Tara Lynn, combien d'anonymes au visage trop banal pour faire oublier un corps trop rond ?

Ashley Graham et Tara Lynn, modèles plus-size

À propos de la mode.
Bon, il y a un truc dans la mode qui me gonfle profondément. Là, je m'adresse aux designers, aux tailleurs, aux industriels qui aimeraient accroître leurs profits avec cette clientèle juteuse.
Hé, les gars, si vous voulez qu'on consomme comme de bons petits soldats, commencez par adapter vos produits à nos corps !
Quand on est "normale" mais petite, c'est déjà pénible de devoir jongler avec du prêt-à-porter mal ajusté (manches ou pantalons trop longs, ceinture qui baille), alors quand on est grosse, ça devient un véritable Enfer.
Entre les couleurs et les motifs ringards des fringues "grandes tailles" qui nous font prendre 30 ans et autant de kilos, les coupes censées masquer les bourrelés mais qui nous font ressembler à des yourtes, ou celles qui gardent certains standards morphologiquement inadaptés (manches étroites sur buste XXL, pantalon dont les jambes s'allongent quand on prend la taille au-dessus), les prix qui augmentent de 25% entre les tailles 38/40 et 42/44, vous rendez notre parcours encore plus désagréable, et nous obligez à aller trouver bonheur sur le net. C'est con, hein ?

J'entends déjà d'ici les moqueurs "T'as qu'à maigrir, grosse vache !" à qui il serait si facile de répondre "Es-tu concerné.e par cet article, ma couille ? Non ? Alors va jouer sur l'autoroute".

Aujourd'hui.
J'ai pris le parti d'être réaliste, même si dans l’absolu, ne m'étant pas vu grossir (je ne me pèse jamais, ce sont mes fringues qui me dénoncent), je me crois toujours plus fine que je ne suis. Cet hiver, après une prise de conscience cosmétique (vive le bio végan), j'ai enfin vidé ma penderie et donné ces vêtements trop petits qui me renvoyaient mon échec à la figure. Bon débarras. Vive la liberté.
C'est aussi l'occasion de me reconstituer une garde-robe, avec des choses qui me font envie, sans réfléchir à ce qu'une grosse devrait porter.

J'ai croisé la route d'un blog sur la pensée positive chez les plus-size. Ça a été une prise de conscience salutaire. Comment mieux vivre sa grossitude si on ne fait pas le deuil d'un passé de mince ? Et pourquoi se conformer à ce que la société attend d'une grosse, alors qu'elle a peut-être envie de porter du court, du coloré, du près du corps ? Pourquoi devrait-on se plier aux diktats d'une société qui n'a aucune bienveillance à notre égard ? Que lui doit-on ? Et pourquoi devrait-on s'interdire des vêtements qui nous plaisent, alors qu'on les autorise sur les autres ?
Le style, ce n'est pas l'apanage d'une Cordula avec sa haine des leggings et des tissus à motifs sur les grosses (venant d'une femme qui ne jure que par la banane, redevenue tendance à cause de certains couturiers... voilà, quoi).


Inciter à se tourner vers du flou, du sombre ou du sobre, ça donne aussi envie de dire merde. J'ai donc décidé d'arrêter de planquer mon corps dans des trucs qui ne me rendaient pas heureuse. Fini le bootcut (moi, c'est le 7/8ème fuselé type slim ou boy-friend qui me botte), moins d'abus du pull noir col V ou des talons tellement hauts que le trajet entre mes orteils et mon talon c'est l'équivalent de la route vers l'Everest, et le fluide ne masquera plus mes formes coûte que coûte.
Oui, j'ai des mollets de veau marin, des bras de culturiste, un Q 16/9ème et un décolleté (ah non, le décolleté est presque normal, ce con !). C'est ainsi, et même mince, j'avais déjà ce problème de proportions. Mais j'ai envie de me faire plaisir. En avant pour du blanc, de la botte, du manteau oversize, de la robe pull. Et tant pis si c'est le plus court chemin pour me faire ressembler à un champignon de Paris sous OGM.

Ça, c'est mon dressing hivernal.

Mes boutiques mode, en ligne ou en magasin :
Investir dans de bons basiques et de belles matières ne doit pas empêcher de se faire plaisir. Et pour les petits budgets, en cherchant un peu, en jouant sur les soldes ou les promo, il y a moyen de se créer un dressing correct sans vendre un rein.
Perso, j'ai un style plutôt classique tendance preppy. Et j'ai sélectionné mes préférés sans casser mon PEL. Car oui, on peut dénicher de jolies choses dans des boutiques populaires.
Kiabi, Bonprix, Blanche Porte, Castaluna, Wish (uniquement pour les colliers. Les fringues chinoises taille zéro et à moitié contrefaites, c'est no way !). J'ai même trouvé des bottes mollets larges sur Amazon ! J'ai tenté Yours, mais ils n'ont jamais la taille dans les produits qui m'intéresse. Mais on n'est pas sur un blog de mode. Je n'y connais rien, aussi, j'arrête là l'analyse fashion.


Pour conclure, je n'ai pas de solution miracle, ni trouvé la motivation nécessaire pour me ramener à un poids moins problématique. Je n'ai pas envie que les autres choisissent ce que je dois être, ni ce que je dois porter. 
Bref, je suis grosse, et j'ai décidé d'arrêter de culpabiliser.