samedi 7 juillet 2018

OSEZ 20 HISTOIRES SEA, SEX & SUN de Collectif


4ème de couverture :
"L'été sera chaud, l'été sera chaud...
Sea, sex & sun, chantait Gainsbourg à la fin des années 1970 dans une France insouciante et joyeuse. Portées par un vent de liberté qui a traversé les décennies, les notes de cette mélodie populaire imprègnent chaque page de ce nouveau recueil de la collection " Osez 20 histoires ". Initiation au sexe entre filles sur une plage bretonne, baise décomplexée dans le wagon surchauffé d'un train du sud de la France, remake porno de Bienvenue chez les ch'tis sur une plage du Nord, étreinte torride sur la dune du Pilat mêlant un homme entre deux âges et une Lolita tombée du ciel... Ce recueil vous fera voyager dans tous les sens du terme et ne contredira pas le refrain de cette autre chanson populaire : l'été sera chaud !"

Alors, doc, verdict ?
L'été arrivant, plutôt que de disserter sur le chef d’œuvre incompris de ce grand lolilol de Heidegger,  j'ai préféré me repaître d'une lecture pleine de sexe et de plages ensoleillées (allez comprendre...). Pour une fois que je suis en phase avec l’actualité littéraire, ça mériterait presque un mojito, tiens ! Santé !
Dès l'instant où j'ai arrêté d'acheter à l'aveugle, pour me référer à l'opinion de lecteurs avertis, j'ai été frustrée par la concision des avis rendus sur cette collection (en particulier pour des services-presse). Avant, lorsque je n'aimais pas une histoire, je passais à la suivante sans attendre. En bloguant à mon tour, il m'a paru intéressant pour les lecteurs, et plus équitable pour les auteurs, de balayer l'ensemble des textes, même si ça chiffonne quelques susceptibilités (elles s'en remettront)...
Certes, je m'étais promis d'en finir avec la collection Osez 20 histoires.
Non en terme de lecture, mais en terme de chronique, tant dépiauter chaque nouvelle peut s'avérer fastidieux, surtout quand on n'aime pas le style d'un auteur. Mais comme on dit, jamais deux sans trois... Le problème, c'est qu'en optant pour un tel décryptage, je n'apprécie plus trop ma lecture pour ce qu'elle est. Aussi, c'est la troisième et dernière fois qu'un Osez fera l'objet d'un compte-rendu exhaustif.

Alors, que vaut ce nouveau Osez ?
Hasard de la sélection, les quatre premières nouvelles ne m'ont pas vraiment convaincue. Passée à côté des qualités de ces textes, j'ai préféré lire les suivants dans le désordre, en priorisant les plumes les moins appréciées. Cela m'a permis de ne pas finir sur une note mitigée. Cette dynamique ne modifie pas l'ordre des chroniques, qui respecte le sommaire de l'éditeur. Après tout, la constante de cette collection, c'est de proposer un large panel de sensibilités littéraires pour satisfaire le maximum de lecteurs. J'ai donc fini ce recueil avec le sourire aux lèvres et l'envie de rouler sur le sable chaud avec chéri. Pour moi, le contrat de ce Osez 20 histoires sea, sex & sun est rempli.

Point particulier, j'ai vraiment aimé que de nombreux textes fassent allusion au safe-sex (capotes et consentement), responsabilisant subtilement ces récits d'amours sans lendemain.

Memento de Irène Louÿs
Cette histoire de GO en Italie ne m'a pas plu pour plusieurs raisons. J'ai eu du mal à accrocher avec le style qui m'a paru un peu décousu. Plus ennuyeux, l'absence de tension permettant d'introduire les scènes érotiques et par la suite, la nature violente de certains actes, m'ont totalement sortie du récit. La conclusion qui sert de justification au reste n'a pas su me remettre dans de bonnes dispositions.

Sea, sex and moon de Dionys Florès
Le style employé est agréable, mais il n'a pas réussi à extraire cette histoire de bain de minuit coquin, d'une certaine routine érotique. Du jeune âge du personnage principal aurait pu résulter un récit plus transgressif, or cet élément n'a jamais été exploité. Dommage.

Nice - Breil-sur-Roya par le train de Aude dite Orium
Le début de cette nouvelle est plaisant, notamment grâce aux dialogues caustiques. Mais bien vite, cette histoire de demoiselle délurée qui allume un inconnu dans un train, puis se sert de sa passivité pour le violenter m'a laissé un goût amer. Peut-être à cause de la gratuité de l'acte. Si une partie de la situation reste excitante dans le cadre d'une lecture érotique, je n'ai pas adhéré à la désinvolture du personnage principal.

C'étaient les vacances de Maître Vicaire Albion
Cette histoire de mère de famille blasée qui saute sur un inconnu pour se faire visiter les deux versants m'a déroutée. La situation décrite est d'abord excitante avant de tomber dans la vulgarité, et les personnages étaient trop ordinaires pour me séduire. La chute aurait pu être amusante et rehausser l'idée générale, si le texte avait été élagué d'un ultime paragraphe sans intérêt pour l'intrigue.

Le paréo bleu de Zakya Gnaoui
Première nouvelle à me plaire sur la forme et sur le fond, l'histoire de cette femme mûre et mélancolique, prof de littérature, a enfin fait passer un peu d'émotion dans une sélection qui en manquait jusqu'à présent. L'autrice prend le temps d'installer son intrigue, renforçant l'empathie envers les personnages. Le format court n'aidant pas forcément ce type de scénario, je suis tout de même restée sur ma faim et aurais apprécié de rester plus longtemps en sa compagnie.

Rien de nouveau sous le soleil de MMK
Le style est très familier, mais ça sert étonnamment bien ce récit décontracté. Jouant avec le cliché du beau moniteur de voile chassé par deux copines en goguette, MMK réussit encore une fois à me surprendre, m'exciter et me faire rire. L'autrice (?) a ce don de glisser de l'émotion, sur un ton franc et sans fioriture. Je m'offre un extra en citant une phrase qui m'a particulièrement touchée : "Il y a de la douceur dans ses yeux, de la tristesse aussi. J'ai envie de le réparer, même si on ne guérit pas les blessures aussi facilement".

Eaux troubles de Clarissa Rivière
Ce récit diablement sensuel met en scène un jeune nettoyeur de piscine, entrepris par toutes les épouses d'expatriés à Tahiti. On ressent bien la langueur provoquée par la moiteur de ce climat tropical, qui incite à abandonner une certaine retenue, jusqu'à en devenir prédatrice. La naïveté de ce jeune homme servant d'objet sexuel exotique est un peu triste, aussi. L'écriture de Clarissa Rivière est toujours aussi charnelle, aboutie, professionnelle. Un délice un peu cruel.

À marée haute de Ornella Caldi
J'ai été charmée par la douceur de cette plume et l'originalité de la première scène érotique. Une jeune fille, séduite par une nouvelle venue au camping, va s'ouvrir à un monde de sensations inédites. Pas besoin d'en dire plus, c'est un très joli texte.

Carpe noctem de Louise Laëdec
Je redécouvre Louise Laëdec dans un style plus classique, coquin sans être cynique ou graveleux, ce qui convient mieux à ma sensibilité. Son début saphique est tendre, sensuel, peut-être un peu terne... jusqu'à l'introduction de Paul et du "nœud" de l'intrigue. Dès lors, le chamboulement des sens prend enfin sens. J'ai adoré le personnage principal, son ambivalence, ses doutes, je me les suis appropriés. Deux histoires en une, nous sommes gâtés.

La vie est à nous de Valéry K. Baran
On ne va pas se mentir, je suis fan de cette autrice, même si je suis capable de garder un esprit critique. Bref, sa nouvelle, c'est pile l'idée que je me faisais du thème ; bonne humeur, nostalgie, insouciance d'une jeunesse révolue (j'ai fait un bond de 25 ans en arrière), esprit un peu roots, jeux érotiques sans prise de tête... Si la concordance des temps paraît parfois maladroite, j'ai réussi à passer au-dessus grâce à ses qualités narratives, à la sincérité du ton, et à l'émotion qu'elle a suscitée !

Sexo-Rallye de Nys Vanessa
La langue soutenue et un peu précieuse de l'autrice se met au service d'un couple de notables à la dérive, en quête d'un nouveau souffle érotique. Si elle m'a fait tiquer avec ce besoin d'afficher les marques de luxe utilisées par ses personnages, j'ai aimé sa pointe de dérision et l'analogie mécanique d'une machinerie en manque d'entretien. La dernière scène est très réussie, sexy.

Bienvenue chez les Ch'tis de Cornelia B. Ferrer
La particularité de cette autrice, c'est d'avoir écrit les récits les plus salés de ces derniers Osez 20 histoires. Le langage est cru, ouvertement pornographique. Mais elle n'en oublie pas de glisser dans sa nouvelle de l'humour, une pincée de perversité et du patois local (sur lequel je ne me suis pas attardée). L'histoire tourne à l'orgie cracra au milieu des dunes. C'est décadent et franchement excitant.

Crème solaire, café, l'addition ! de Juliette Di Cen
Le serveur d'un bar de plage, un massage à l'huile solaire qui dégénère, des ébats aquatiques... on peut difficilement faire plus cliché. Et pourtant, ça fonctionne, bien que le style soit moins travaillé que d'habitude, presque bâclé. Heureusement, ça ne se prend jamais au sérieux, les dialogues se succèdent à un rythme soutenu, dessinant le caractère de chacun en quelques mots. J'ai bien aimé la tension érotique dégagée par la scène de massage, le soupçon de flirt maladroit et la chute, cocasse.

Boris de ChocolatCannelle
J'aime beaucoup la fluidité et l'apparente facilité avec laquelle cette autrice rédige ses histoires. Son style est harmonieux, le ton toujours incisif. Cette nouvelle-ci est assez déchirante ; les affres de la jeunesse aux prises avec un objet de désir quasi inatteignable. J'ai souffert aux côtés de cette toute jeune femme, tant on sent qu'elle va se fourvoyer. Ceci étant la chute m'a réconciliée avec ce monde de brutes.

La Salinette de Jean Danel
La plume de Jean Danel est vraiment élégante, avec une touche vintage que j'attribue (peut-être faussement) à l'expérience de cet auteur, qui semble se mettre en scène auprès d'une compagne bien plus jeune. Cela m'a fait penser au livre Emmanuelle. J'ai été séduite par le récit, presque une initiation sensuelle, et la chute a provoqué le rire d'adhésion finale.

Mélanie, ma douce éclipse de Jon Blackfox
Une histoire qui commence comme celles qu'on se raconte autour d'un feu de camp, pleine d'épouvante et de légendes sanglantes. Cette crainte ne se dissout jamais réellement. Tout au long du récit, on s'attend à ce que ces peurs prennent vie. Je suis moins enthousiaste quant au style, qui m'a semblé assez plat.

En repérage à la plage de Romuald Ward
C'est étrange, dès les premières lignes et plus particulièrement celles décrivant le personnage principal, j'ai senti quelque chose de malsain s'en dégager. Sans déflorer l'intrigue, je trouve son placement dans le sommaire, après Jon Blackfox, particulièrement adéquat... et apte à détruire le bien-être que les textes précédents avaient pu procurer !

La dune lactée de Héloïse Lesage
Une caricature de touriste, une jeune et jolie autochtone, et la plume excitante d'Héloïse Lesage pour encadrer cette rencontre improbable. Entre poésie et obscénité, pudeur des sentiments et pornographie des chorégraphies, une valeur sûre de la collection des Osez.

Saxophomme de Jean-Luc Manet
Le mélange des temps de narration m'a déroutée et sortie du récit plusieurs fois. J'ai aussi trouvé la discussion et le passage à l'acte bien trop rapides, comme si la tension sexuelle n'avait pas eu le temps de s'installer. Les personnages n'ont pas su me toucher. Dommage. Une rencontre manquée.

Été pourri de João Miguel Baile Dos Passarinhos
Dans un style moins affecté que d'habitude, l'auteur propose une introduction à des vacances ratées. Et ça s'arrête là. Cette nouvelle, peut-être retenue pour sa référence finale à La Musardine, clôture le recueil par la même occasion.

Verdict : Une bonne sélection de nouvelles, pour un recueil à lire sur la plage, sous la tente, au bord de l'eau, dans le train, l'avion, bref, direction les vacances !

LA MUSARDINE
256 pages

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire