dimanche 1 octobre 2017

LES ERRANTS 3 : DISPERSIONS de Denis Labbé

4ème de couverture
« Alors que je me saisis sans doute pour la dernière fois de mon crayon, je sens le poids du monde sur mes épaules. »
"Toujours aux portes de Lunéville, les ados survivants, menés par Marion, doivent affronter de nouvelles menaces. Dans un monde qui se décompose, les Errants ne sont plus leur unique inquiétude. Entre les mutations qui se développent, les bandes armées qui battent la campagne et les militaires qui ne parviennent pas à repousser les hordes en marche, la petite troupe va devoir faire preuve d’initiatives, de courage et de sacrifice pour s’en sortir. Il n’est pourtant pas certain que tous y parviennent.."

Alors, doc, verdict ?
Pas d'arrêt sur image sur le tome 2 qui enchaîne directement sur le précédent. Défauts et qualités s'y retrouvent, avec un petit plus, la rencontre de nouveaux types de zombies, entretenant ainsi la tension à son maximum.
Je passe donc directement au tome 3.

Ayant suivi les aventures de Marion et sa bande depuis le début, je me demandais comment Denis Labbé allait conclure son histoire. Ce n'est d'ailleurs que la fin d'un premier cycle, l'auteur ayant produit deux séries dérivées de celle-ci.

Un mot sur la couverture. J'aime beaucoup le travail de l'illustrateur sur ces trois tomes, mais là, j'ai tout de même émis un petit cri de souris en découvrant la dernière.
Si ça se met à spoiler dès la couverture, mais où va-t-on mon bon monsieur ?

Enthousiasmée par une micro nouvelle PETIT PAPA ERRANT dont j'avais goûté le sens du style et la parfaite maîtrise de l'angoisse, j'avais apprécié l'intrigue des ERRANTS, sans adhérer à la narration et au caractère du personnage principal.

Ceci étant, je ne partage pas les critiques concernant la redondance des aventures de ce groupe d'ado, bien que certaines scènes n'aient rien apporté à l'intrigue.
Cela ne me dérange pas car ça fait aussi partie du genre ; on se fait attaquer par des zombies, on les combat, on s'enfuit, on se planque, on se fait attaquer par des zombies, on les combat, etc.
Ce qui permet à une histoire d'avancer, c'est l'évolution des personnages, l'introduction de nouveaux, leurs interactions et leur appréhension de la situation, voire le contexte des attaques. Le reste est un éternel recommencement, la série THE WALKING DEADS en est la parfaite illustration.

Les choses qui ne m'ont pas convaincue.
Je réitère mes réserves concernant Marion, et les dialogues.
Malgré la narration insistant lourdement sur la façon dont elle est perçue par le groupe, et les tentatives de l'auteur d'en faire le leader vers lequel il semble naturel de se tourner, Marion n'a aucun charisme. Ses contradictions perpétuelles (hystérie/introspection/jalousie/auto-apitoiement) la rendent pénible tout en accentuant le décalage avec d'autres personnages plus intéressants.
Dans les faits (et c'est bien triste parce que j'aurais adoré que Denis Labbé réussisse un personnage principal féminin), c'est Louis qui se voit attribuer ce rôle.
C'est amusant car un personnage comme Cornélia, plus constant, mature, singulier et offensif en avait l'étoffe, justement. Personnage à gros potentiel, l'auteur en a fait l'héroïne d'une de ses séries dérivées PROJET CORNELIA, et Louis le héros de l'autre série ERRANCES.
Ce n'est donc pas un hasard.

Concernant les dialogues, ils sont toujours trop élaborés, que ce soit dans la bouche d'ado ou d'adultes, et tiennent peu compte du contexte (urgence et danger). Trop littéraires, donc peu spontanés, trop longs, ils cassent le rythme et alourdissent les échanges.
Ça m'a donné une image scolaire du texte.

En aparté : trop de "ma puce" tue (comme le virus). Les ado actuels font rarement dans ce genre de mièvrerie. Prénoms, surnoms, insultes "affectueuses", leurs échanges sont de plus en plus empreints d'une agressivité, qui me semble mal restituée ici. Dans la vie réelle, quand deux filles se charrient, ça tourne vite au "arrête de faire ta connasse" (agacement affectueux). Le "t'es conne", est rarement employé entre vraies copines (insulte dévalorisante).

En dehors d'une mention erronée sur les cours martiales lors d'une discussion avec un militaire français (les CM ont été supprimées en 1928, quant aux tribunaux militaires, c'était en 2012), j'ai trouvé le boulot de documentation convaincant.

Les choses qui m'ont plu.
Pas de doute, Denis Labbé sait raconter une bonne histoire.
Mêlant Grande Histoire et survival contemporain, il a su insuffler ce sentiment d'urgence et de danger dans chaque scène. J'ai justement adoré le fait qu'à chaque étape, le danger rode, qu'il n'y ait pas de petit paradis intouchable. C'est désespérant, mais c'est ça une histoire de zombie ; le côté inéluctable de la pandémie qui malgré la lutte, gagne toujours plus de terrain.

Son idée de créer différents types d'errants est géniale, y compris les explications concernant leur création. J'aurais d'ailleurs aimé qu'il creuse la question et explore toutes les hypothèses dans ce tome, raccourcissant en retour l'état de siège dans les différents villages.

J'ai aussi apprécié l'interaction entre les personnages. Occultant (involontairement) la narration à la première personne lors des scènes d'action, j'ai enfin pu placer les personnages sur un pied d'égalité. Ces scènes-là sont haletantes, bien construites, et mettent en valeur les autres protagonistes.

Celui de Jean-Michel est le plus intriguant, même si le côté "va-t-en-guerre" est excessif. C'est avec Cornélia celui qui me plaît le plus.
Encore une fois, pas de hasard, ces deux-là se retrouvent dans une série dérivée.

Pour finir, cet indéniable savoir-faire rend le récit addictif, ménage les phases de suspense tout en conservant l'intrigue sous une tension permanente.

Toutefois, si un auteur doit être différencié de son œuvre, les réseaux sociaux permettent de révéler les caractères, et de dénoncer certains comportements. Pour avoir croisé Denis Labbé au détour de différentes discussions, et ne parvenant plus à occulter les propos injurieux ou le ton condescendant sur lequel ils avaient été tenus, j'ai décidé de ne plus acheter ses romans ni de suivre la carrière de cet auteur.

Verdict : une lecture prenante

ÉDITIONS DU CHAT NOIR
330 pages en numérique

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